Rencontre avec Claire et Nicolas

Harpiste et hautboïste aux Ondes plurielles

Nicolas Renard Ondes plurielles

Joyaux d’orchestration, la Symphonie fantastique de Berlioz et l’Apprenti sorcier de Dukas se distinguent par un usage expressionniste des timbres des instruments pour raconter des histoires et dépeindre des univers sonores. Parmi eux la harpe et le hautbois, Claire Canella et Nicolas Renard.

Quel est le rôle de votre instrument dans les œuvres ?

Claire : La harpe ou plutôt les harpes (Berlioz écrit pour deux harpes, mais j’ai pu voir des versions où six harpes jouaient) ouvrent le bal dans le deuxième mouvement. Elle participe à la rythmique de la valse, avec le premier temps appuyé à la main gauche, et des motifs laissant supposer les deuxièmes et troisièmes temps à la main droite. Un classique de la harpe en orchestre ! Dans l’Apprenti sorcier, plus cachée, la harpe apporte une touche de magie notamment grâce aux glissés du début de l’œuvre.

Nicolas : Le rôle du hautbois est surtout notable dans le troisième mouvement de la symphonie, la scène aux champs, où le premier hautbois dialogue, depuis les coulisses souvent, avec le cor anglais sur scène, imitant ainsi les pasteurs en Suisse. Jusqu’à ce qu’il ne réponde plus, à la fin…

C’est la première fois que vous jouez ces œuvres. Un désir de longue date ?

Nicolas : Oui, pour la Fantastique ! Et même si je préfère le répertoire romantique à Dukas, Fantasia m’a donné très envie de me lancer dans l’Apprenti sorcier.

Claire : Petite, j’étais émerveillée devant Mickey et les balais de Fantasia ! C’est donc un honneur pour moi de jouer cette pièce !

Le hautbois comme la harpe ont des places à part dans l’orchestre. Pas trop sorcier ?

Nicolas : Être hautbois solo dans un grand orchestre comme celui de la Fantastique ou de la neuvième symphonie de Bruckner (donnée par les Ondes en avril 2022) est impressionnant ; techniquement, nous sommes loin du chef, avec qui nous devons pourtant rester connectés. Mais c’est aussi ce qui fait la magie du concert ! J’ai aussi pu jouer du cor anglais avec les Ondes : cela amène à chercher d’autres repères dans l’orchestre, puisque notre timbre se rapproche davantage des altos que des violons, et à expérimenter un rôle différent, moins perché dans les mélodies aiguës, plus dans le soutien comme les bassons.

Claire : L’un des premiers défis de la harpe en orchestre est…son transport ! Quand je suis arrivée aux Ondes en octobre 2021 pour jouer dans la Danse macabre de Saint-Saëns, j’ai été touchée par leur attention à ce petit détail !
Plus sérieusement, jouer en orchestre change tout : en arrivant j’ai appliqué les règles de la musique de chambre que je connaissais, tout en veillant à ajuster mon jeu en fonction du chef et de la dynamique de l’orchestre. La harpe en orchestre a son propre pupitre et n’est pas toujours placée au même endroit en fonction de ce qu’elle joue. Elle peut se distinguer avec des passages de soliste, être juste un peu plus mise en avant, ou enfin renforcer la partition d’autres instruments. Un challenge pour moi par rapport à la musique de chambre : apprendre à ne pas être trop concentrée sur mes mains et la partition, et lever un peu plus la tête et regarder le chef !

La Fantastique se présente comme des épisodes de la vie d’un artiste animé par la passion. La vôtre ?

Claire : La harpe ! Je prépare ma deuxième carte blanche au conservatoire de Houilles, et je souhaite continuer à découvrir les œuvres du répertoire orchestral, une corde qui manque à mon arc ! J’aime aussi casser les codes et démocratiser cet instrument, en reprenant des musiques plus populaires sur une chaîne Youtube !

Nicolas : À côté de la musique, ma première passion est l’avion. Je suis chercheur en aérodynamique et pilote privé d’avion à mes heures perdues. Le pilotage exige comme le hautbois une pratique régulière et rigoureuse, mais c’est presque plus facile. Certes, on est davantage contraint car on ne peut se permettre certaines grosses erreurs qui engageraient la sécurité du vol, mais la recherche de la perfection est moins cruciale qu’à l’orchestre où le moindre petit faux pas du hautbois peut retentir sur tout le groupe !